Ton amour est-il pur comme les forêts vierges,
Berceur comme la nuit, frais comme le Printemps?
Est-il mystérieux comme l’éclat des cierges,
Ardent comme la flamme et long comme le temps?
Lis-tu dans la nature ainsi qu’en un grand livre?
En toi, l’instinct du mal a-t-il gardé son mors?
Préfères-tu, – trouvant que la douleur enivre, –
Le sanglot des vivants au mutisme des morts?
Avide de humer l’atmosphère grisante,
Aimes-tu les senteurs des sapins soucieux,
Celles de la pluie âcre et de l’Aube irisante
Et les souffles errants de la mer et des cieux?
Et les chats, les grands chats dont la caresse griffe,
Quand ils sont devant l’âtre accroupis de travers,
Saurais-tu déchiffrer le vivant logogriphe
Qu’allume le phosphore au fond de leurs yeux verts?
Es-tu la confidente intime de la lune,
Et, tout le jour, fuyant le soleil ennemi,
As-tu l’amour de l’heure inquiétante et brune
Où l’objet grandissant ne se voit qu’à demi?
S’attache-t-il à toi le doute insatiable,
Comme le tartre aux dents, comme la rouille au fer?
Te sens-tu frissonner quand on parle du diable,
Et crois-tu qu’il existe ailleurs que dans l’enfer?
As-tu peur du remords plus que du mal physique,
Et vas-tu dans Pascal abreuver ta douleur?
Chopin est-il pour toi l’Ange de la musique,
Et Delacroix le grand sorcier de la couleur?
As-tu le rire triste et les larmes sincères,
Le mépris sans effort, l’orgueil sans vanité?
Fuis-tu les cœurs banals et les esprits faussaires
Dans l’asile du rêve et de la vérité?
– Hélas! autant vaudrait questionner la tombe!
La bouche de la femme est donc close à jamais
Que, nulle part, le Oui de mon âme n’en tombe?…
Je l’interroge encore et puis encore… mais,
Hélas! autant vaudrait questionner la tombe!…