Sonnet.
Nature, accomplis-tu tes œuvres au hasard,
Sans raisonnable loi ni prévoyant génie?
Ou bien m’as-tu donné par cruelle ironie
Des lèvres et des mains, l’ouïe et le regard?
Il est tant de saveurs dont je n’ai point ma part,
Tant de fruits à cueillir que le sort me dénie!
Il voyage vers moi tant de flots d’harmonie,
Tant de rayons qui tous m’arriveront trop tard!
Et si je meurs sans voir mon idole inconnue,
Si sa lointaine voix ne m’est point parvenue,
À quoi m’auront servi mon oreille et mes yeux?
À quoi m’aura servi ma main hors de la sienne?
Mes lèvres et mon cœur, sans qu’elle m’appartienne?
Pourquoi vivre à demi quand le néant vaut mieux?
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