À Lucien Marcheix.
Je porte des douleurs plus vieilles que moi-même,
Mon cœur est encombré de chagrins hérités,
Et je sens quelquefois mon front devenir blême
De remords que je sais n’avoir pas mérités ;
L’angoisse, les regrets, les tares, les faiblesses
De ceux d’où nous sortons roulent à travers nous,
Pour passer, augmentés de nos propres détresses,
Par le cœur des enfants bercés sur nos genoux ;
Un fleuve plus chargé de hontes et d alarmes
Descend en emportant dans ses érosions
Des opprobres nouveaux et de nouvelles larmes,
Et grossit à travers les générations ;
Jusqu’à ce qu’entraînant toujours plus de misère,
Il charrie, en ses flots sans cesse plus malsains,
Un poison si puissant de mal héréditaire,
Qu’il tue, en y passant, les derniers cœurs humains ;
Et qu’épuisant enfin dans des êtres étranges
Son onde d’amertume en un dernier effort,
Il aille déposer ses limons et ses fanges
Dans l’estuaire immense et morne de la Mort.





Poèmes similaires:
- La géante Sonnet. Du temps que la Nature en sa verve puissante Concevait chaque jour des enfants monstrueux, J’eusse aimé vivre auprès d’une jeune géante, Comme aux […]...
- Le vampire Toi qui, comme un coup de couteau, Dans mon coeur plaintif es entrée ; Toi qui, forte comme un troupeau De démons, vins, folle et […]...
- Sur mes vingt ans, pur d’offense et de vice Sur mes vingt ans, pur d’offense et de vice, Guidé, mal-caut, d’un trop aveugle oiseau, Ayant encore le menton damoiseau, Sain et gaillard je vins […]...
- Les seins L’éclosion superbe et jeune de ses seins Pour enchaîner mes yeux fleurit sur sa poitrine. Tels deux astres jumeaux dans la clarté marine Palpitent dévolus […]...
- École buissonnière Ma pensée est une églantine Éclose trop tôt en avril, Moqueuse au moucheron subtil Ma pensée est une églantine ; Si parfois tremble son pistil […]...
- Le crépuscule du soir Voici le soir charmant, ami du criminel ; Il vient comme un complice, à pas de loup ; le ciel Se ferme lentement comme une […]...
- À son âme Amelette Ronsardelette, Mignonnelette doucelette, Treschere hostesse de mon corps, Tu descens là bas foiblelette, Pasle, maigrelette, seulette, Dans le froid Royaume des mors : Toutesfois […]...
- Il ne faut pas les appeler cruelles Il ne faut pas les appeler cruelles : Elles le sont tout naturellement, Comme les fleurs, quelquefois les plus belles, Dont le parfum fait qu’on […]...
- Le regard Cache-moi ton regard plein d’âme et de tristesse, Dont la langueur brûlante affaiblit ma raison ; De l’amour qu’il révèle il m’apprendrait l’ivresse ; Pour […]...
- Mois de juillet Le ciel flambe et la terre fume, La caille frémit dans le blé ; Et, par un spleen lourd accablé, Je dévore mon amertume. Sous […]...
- Je devine, à travers un murmure Je devine, à travers un murmure, Le contour subtil des voix anciennes Et dans les lueurs musiciennes, Amour pâle, une aurore future! Et mon âme […]...
- Je me suis affranchi de prison Or je me suis affranchi de prison, Où me tenait cruellement en ferre L’enfant Amour, je vais libre sur terre Sauvé des flots, et repris […]...
- Devant la mer, un soir Devant la mer, un soir, un beau soir d’Italie, Nous rêvions… toi, câline et d’amour amollie, Tu regardais, bercée au cœur de ton amant, Le […]...
- Poison perdu Sonnet. Des nuits du blond et de la brune Pas un souvenir n’est resté Pas une dentelle d’été, Pas une cravate commune ; Et sur […]...
- Au lecteur La sottise, l’erreur, le péché, la lésine, Occupent nos esprits et travaillent nos corps, Et nous alimentons nos aimables remords, Comme les mendiants nourrissent leur […]...
- Amour, tu sembles Amour tu sembles au phalange qui point Lui de sa queue, et toi de ta quadrelle : De tous deux est la pointure mortelle, Qui […]...
- La vipère et la sangsue La vipère disait un jour à la sangsue : Que notre sort est différent! On vous cherche, on me fuit, si l’on peut on me […]...
- Le tombeau de Charles Baudelaire Le temple enseveli divulgue par la bouche Sépulcrale d’égout bavant boue et rubis Abominablement quelque idole Anubis Tout le museau flambé comme un aboi farouche […]...
- Ode saphique XXX Belle dont les yeux doucement m’ont tué Par un doux regard qu’au cœur ils m’ont rué, Et m’ont en un roc insensible mué En mon […]...
- La mort de Cléopâtre Sur la peau de lion, fauve et royal coussin, Voyez agoniser la belle Cléopâtre. Elle est là toute nue, et de ses bras d’albâtre L’œil […]...
- Crépuscule du soir mystique Le Souvenir avec le Crépuscule Rougeoie et tremble à l’ardent horizon De l’Espérance en flamme qui recule Et s’agrandit ainsi qu’une cloison Mystérieuse où mainte […]...
- Le fantôme D’un souffle printanier l’air tout à coup s’embaume. Dans notre obscur lointain un spectre s’est dressé, Et nous reconnaissons notre propre fantôme Dans cette ombre […]...
- Dans cette ville où rien ne rit Dans cette ville où rien ne rit et ne palpite, Comme dans une femme aujourd’hui décrépite, On sent que quelque chose, hélas! a disparu! Les […]...
- Insoumission À Lionel Nunès. Vivre tranquille en sa maison, Vertueux ayant bien raison, Vaut autant boire du poison. Je ne veux pas de maladie, Ma fierté […]...
- Ballade des mauvaises personnes Qu’on vive dans les étincelles Ou qu’on dorme sur le gazon Au bruit des râteaux et des pelles, On entend mâles et femelles Prêtes à […]...
- L’héautontimorouménos À J. G. F. Je te frapperai sans colère Et sans haine, comme un boucher, Comme Moïse le rocher! Et je ferai de ta paupière, […]...
- Ici de mille fards la trahison se déguise Sonnet CXXVII. Ici de mille fards la trahison se déguise, Ici mille forfaits pullulent à foison, Ici ne se punit l’homicide ou poison, Et la […]...
- Ô tragiques instants du départ Ô tragiques instants du départ, heure amère Où toute véritable amante se sent mère Et, mesurant sa force à son amour pour nous, Nous berce […]...
- Guitare GASTIBELZA, l’homme à la carabine, Chantait ainsi : » Quelqu’un a-t-il connu doña Sabine? Quelqu’un d’ici? Dansez, chantez, villageois! la nuit gagne Le mont Falù […]...
- Quand je suis tout baissé sur votre belle face Quand je suis tout baissé sur votre belle face, Je vois dedans vos yeux je ne sais quoi de blanc, Je ne sais quoi de […]...
- La mort des pauvres Sonnet. C’est la Mort qui console, hélas! et qui fait vivre ; C’est le but de la vie, et c’est le seul espoir Qui, comme […]...
- Un grand chemin ouvert Sonnet. Un grand chemin ouvert, une banale route À travers vos moissons ; tout le jour, au soleil Poudreuse ; dont le bruit vous ôte […]...
- Contre une vieille importune Sonnet. Furie aux crins retors, exécrable mégère, Qui te fait tant vomir de poison contre moi, Et troubler la beauté qui me donne la loi […]...
- Quand le fil de ma vie Quand le fil de ma vie (hélas! il tient à peine ) Tombera du fuseau qui le retient encor ; Quand ton nom, mêlé dans […]...
- Les parfums Mon cœur est un palais plein de parfums flottants Qui s’endorment parfois aux plis de ma mémoire, Et le brusque réveil de leurs bouquets latents […]...
- A toi Mon cœur est méconnu, si l’on soupçonne même Qu’une terrestre ardeur se mêle à son amour, Et que brûlant pour toi d’une flamme d’un jour, […]...
- Évocation J’ai longtemps écouté tes doux chuchotements, Muse ou démon des jours actuels. Mais tu mens! Venez Nymphes, avec vos longues chevelures ; Chantez, rossignols morts […]...
- Le fantôme du crime À Edmond Haraucourt. La mauvaise pensée arrive dans mon âme En tous lieux, à toute heure, au fort de mes travaux, Et j’ai beau m’épurer […]...
- La bise se rue à travers La bise se rue à travers Les buissons tout noirs et tout verts, Glaçant la neige éparpillée Dans la campagne ensoleillée. L’odeur est aigre près […]...
- Le moyen de se connaître L’idole qui règne sur nous Voudrait y régner sans partage : Aussi nos travers sont jaloux, Chacun d’eux hait sa propre image. Désires-tu donc aujourd’hui […]...