Une course au Champs de Mars

Volez, nobles coursiers, franchissez la distance!
Pour le prix disputé, luttez avec constance!
Sous un soleil de feu, le sol est éclatant ;
Pour vous voir aujourd’hui, tout est bruit et lumière ;
Ainsi qu’un flot d’encens, la légère poussière,
Devant vos pas, s’envole au but qui vous attend.
Que l’air rapide et vif, soulevant vos poitrines,
S’échappe palpitant de vos larges narines!
Laissez sous l’éperon votre flanc s’entr’ouvrir…
Volez, nobles coursiers, dussiez-vous en mourir!

Au milieu des bravos, votre course s’achève ;
Le silence revient – puis, je pense et je rêve…
Notre vie est l’arène où se hâtent nos pas ;
Nous volons vers le but que l’on ne connaît pas.
Fatigués, épuisés, prêts à tomber, qu’importe!
Nous marchons à grands pas, le torrent nous emporte.
Oubliant le passé, repoussant le présent,
Nos regards inquiets se portent en avant ;
Rien n’est beau que plus loin… et notre flanc palpite,
Sous l’éperon caché qui nous dit :  » Marche vite!  »
Nous marchons. – Quelquefois, à travers les déserts,
Une oasis répand ses parfums dans les airs,
Un doux chant retentit sur le bord de la route :

L’oasis, on la fuit ; le chant, nul ne l’écoute.
Sans garder du chemin regret ou souvenir,
D’un avide regard, on cherche l’avenir ;
L’avenir, c’est le but! l’avenir, c’est la vie!
Bientôt, à notre gré, la distance est franchie ;
Haletants de la course, épuisés de l’effort,
Nous touchons l’avenir… L’avenir, c’est la mort!

Qu’ai-je dit? – Ô mon Dieu! toi qui m’entends, pardonne!…
L’avenir, c’est le ciel, où ton soleil rayonne
Sans que la nuit succède à l’éclat d’un beau jour,
Sans que l’oubli succède aux paroles d’amour!
L’avenir, c’est le ciel où s’arrête l’orage!
C’est le port qui reçoit les débris du naufrage ;
C’est la fin des regrets ; c’est l’éternel printemps ;
C’est l’ange dont la voix a de divins accents.
L’avenir, ô mon Dieu! c’est la sainte auréole
Que pose sur nos fronts ta main qui nous console.
Oui, marchons! et vers toi levant souvent les yeux,
Avançons vers le but que nous montrent les cieux.

Chut! voici le signal, franchissez la distance.
Volez, nobles coursiers, luttez avec constance!
Sous un soleil de feu, le sol est éclatant ;
Pour vous voir aujourd’hui, tout est bruit et lumière ;
Ainsi qu’un flot d’encens, la légère poussière,
Devant vos pas, s’envole au but qui vous attend.
Que l’air rapide et vif, soulevant vos poitrines,
S’échappe palpitant de vos larges narines!
Laissez sous l’éperon votre flanc s’entr’ouvrir…
Volez, nobles coursiers, dussiez-vous en mourir!


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Verset Une course au Champs de Mars - Sophie d'Arbouville