Dans les ruines d’une abbaye

Seuls tous deux, ravis, chantants!
Comme on s’aime!
Comme on cueille le printemps
Que Dieu sème!

Quels rires étincelants
Dans ces ombres,
Pleines jadis de fronts blancs,
De coeurs sombres!

On est tout frais mariés.
On s’envoie
Les charmants cris variés
De la joie.

Purs ébats mêlés au vent
Qui frissonne!
Gaietés que le noir couvent
Assaisonne!

On effeuille des jasmins
Sur la pierre
Où l’abbesse joint les mains
En prière.

Les tombeaux, de croix marqués,
Font partie
De ces jeux, un peu piqués
Par l’ortie.

On se cherche, on se poursuit,
On sent croître
Ton aube, amour, dans la nuit
Du vieux cloître.

On s’en va se becquetant,
On s’adore,
On s’embrasse à chaque instant,
Puis encore,

Sous les piliers, les arceaux,
Et les marbres.
C’est l’histoire des oiseaux
Dans les arbres.


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Verset Dans les ruines d’une abbaye - Victor Hugo