Sous les arbres

Ils marchaient à côté l’un de l’autre ; des danses
Troublaient le bois joyeux ; ils marchaient, s’arrêtaient,
Parlaient, s’interrompaient, et, pendant les silences,
Leurs bouches se taisant, leurs âmes chuchotaient.

Ils songeaient ; ces deux coeurs, que le mystère écoute,
Sur la création au sourire innocent
Penchés, et s’y versant dans l’ombre goutte à goutte,
Disaient à chaque fleur quelque chose en passant.

Elle sait tous les noms des fleurs qu’en sa corbeille
Mai nous rapporte avec la joie et les beaux jours ;
Elle les lui nommait comme eût fait une abeille,
Puis elle reprenait :  » Parlons de nos amours.

Je suis en haut, je suis en bas « , lui disait-elle,
 » Et je veille sur vous, d’en bas comme d’en haut.  »
Il demandait comment chaque plante s’appelle,
Se faisant expliquer le printemps mot à mot.

Ô champs! il savourait ces fleurs et cette femme.
Ô bois! ô prés! nature où tout s’absorbe en un,
Le parfum de la fleur est votre petite âme,
Et l’âme de la femme est votre grand parfum!

La nuit tombait ; au tronc d’un chêne, noir pilastre,
Il s’adossait pensif ; elle disait :  » Voyez
Ma prière toujours dans vos cieux comme un astre,
Et mon amour toujours comme un chien à tes pieds. « 

Juin 18…


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Verset Sous les arbres - Victor Hugo