Voici le temps passé de cette sombre lutte ;
Vivant, mais épuisé, mais meurtri par la chute,
A la taille de l’homme enfin redressons-nous!
Si l’avenir nous garde encore quelque disgrâce,
Demeurons invincible à sa froide menace,
Le regardant en face,
Pour attendre ses coups.
Tenons au fond du cœur toute douleur captive,
Qu’elle y fasse sa plaie ardente, et toujours vive,
Qu’elle saigne au-dedans mais ne se montre pas ;
Si l’on nous cherche au front quelque ride profonde,
Jetons un fier sourire au regard qui nous sonde,
Et soyons pour le monde
Un heureux d’ici-bas.
Quand le chaume s’embrase on ne voit pas encore
Le feu qui sourdement le broie et le dévore ;
La surface au soleil étincelle et reluit ;
Mais vienne l’ouragan, la flamme alors s’irrite,
L’incendie apparaît, le toit se précipite,
Et tout disparaît vite,
Chaume, lumière et bruit.
Ainsi de nous, mon âme! ainsi de notre vie!…
Chaume vivant, en proie au muet incendie,
Quand tout n’est plus que cendre, arrive l’aquilon!
Qu’en nous voyant tomber sans plainte et sans murmure,
Le vulgaire s’écrie : Où donc est la blessure?
Point de sang à l’armure ;
Douleur, n’es-tu qu’un nom?