Désespérément

L’immense ennui, ce fils bâtard de la douleur,
En maître est installé dans mon âme et l’habite,
Et moins que la vieillesse affreuse et décrépite,
Cette âme de trente ans a gardé de chaleur.

J’en atteste ces yeux éteints, cette pâleur
Et ce cœur sans amour où plus rien ne palpite ;
Je vois mon avenir et je m’y précipite
Ainsi qu’en un désert qui n’a pas une fleur.

Pourtant, vers la saison des brises réchauffées,
La jeunesse parfois me revient par bouffées,
J’aspire un air plus pur, je vois un ciel plus beau.

Mais cette illusion ne m’est pas un présage,
Et l’espoir n’est pour moi qu’un oiseau de passage
Qui, pour faire son nid, choisirait un tombeau.


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Verset Désespérément - François Coppée