Il a parlé. Prévoyante ou légère,
Sa voix cruelle et qui m’était si chère
A dit ces mots qui m’atteignaient tout bas :
» Vous qui savez aimer, ne m’aimez pas!
» Ne m’aimez pas si vous êtes sensible,
» Jamais sur moi n’a plané le bonheur.
» Je suis bizarre et peut-être inflexible ;
» L’amour veut trop : l’amour veut tout un coeur
» Je hais ses pleurs, sa grâce ou sa colère ;
» Ses fers jamais n’entraveront mes pas. «
Il parle ainsi, celui qui m’a su plaire…
Qu’un peu plus tôt cette voix qui m’éclaire
N’a-t-elle dit, moins flatteuse et moins bas :
» Vous qui savez aimer, ne m’aimez pas!
» Ne m’aimez pas! l’âme demande l’âme.
» L’insecte ardent brille aussi près des fleurs :
» Il éblouit, mais il n’a point de flamme ;
» La rose a froid sous ses froides lueurs.
» Vaine étincelle échappée à la cendre,
» Mon sort qui brille égarerait vos pas. «
Il parle ainsi, lui que j’ai cru si tendre.
Ah! pour forcer ma raison à l’entendre,
Il dit trop tard, ou bien il dit trop bas :
» Vous qui savez aimer, ne m’aimez pas. «