I.
À qui donc le grand ciel sombre
Jette-t-il ses astres d’or?
Pluie éclatante de l’ombre,
Ils tombent…? – Encor! encor!
Encor! – lueurs éloignées,
Feux purs, pâles orients,
Ils scintillent… – ô poignées
De diamant effrayants!
C’est de la splendeur qui rôde,
Ce sont des points univers,
La foudre dans l’émeraude!
Des bleuets dans des éclairs!
Réalités et chimères
Traversant nos soirs d’été!
Escarboucles éphémères
De l’obscure éternité!
De quelle main sortent-elles?
Cieux, à qui donc jette-t-on
Ces tourbillons d’étincelles?
Est-ce à l’âme de Platon?
Est-ce à l’esprit de Virgile?
Est-ce aux monts? est-ce au flot vert?
Est-ce à l’immense évangile
Que Jésus-Christ tient ouvert?
Est-ce à la tiare énorme
De quelque Moïse enfant
Dont l’âme a déjà la forme
Du firmament triomphant?
Ces feux-là vont-ils aux prières?
À qui l’Inconnu profond
Ajoute-t-il ces lumières,
Vagues flammes de son front?
Est-ce, dans l’azur superbe,
Aux religions que Dieu,
Pour accentuer son verbe,
Jette ces langues de feu?
Est-ce au-dessus de la Bible
Que flamboie, éclate et luit
L’éparpillement terrible
Du sombre écrin de la nuit?
Nos questions en vain pressent
Le ciel, fatal ou béni.
Qui peut dire à qui s’adressent
Ces envois de l’infini?
Qu’est-ce que c’est que ces chutes
D’éclairs au ciel arrachés?
Mystère! Sont-ce des luttes?
Sont-ce des hymens? Cherchez.
Sont-ce les anges du soufre?
Voyons-nous quelque essaim bleu
D’argyraspides du gouffre
Fuir sur des chevaux de feu?
Est-ce le Dieu des désastres,
Le Sabaoth irrité,
Qui lapide avec des astres
Quelque soleil révolté?