(Les hôtes)
– Ouvrez, les gens, ouvrez la porte,
Je frappe au seuil et à l’auvent,
Ouvrez, les gens, je suis le vent,
Qui s’habille de feuilles mortes.
– Entrez, monsieur, entrez, le vent,
Voici pour vous la cheminée
Et sa niche badigeonnée ;
Entrez chez nous, monsieur le vent.
– Ouvrez, les gens, je suis la pluie,
Je suis la veuve en robe grise
Dont la trame s’indéfinise,
Dans un brouillard couleur de suie.
– Entrez, la veuve, entrez chez nous,
Entrez, la froide et la livide,
Les lézardes du mur humide
S’ouvrent pour vous loger chez nous.
– Levez, les gens, la barre en fer,
Ouvrez, les gens, je suis la neige,
Mon manteau blanc se désagrège
Sur les routes du vieil hiver.
– Entrez, la neige, entrez, la dame,
Avec vos pétales de lys
Et semez-les par le taudis
Jusque dans l’âtre où vit la flamme.
Car nous sommes les gens inquiétants
Qui habitent le Nord des régions désertes,
Qui vous aimons – dites, depuis quels temps? –
Pour les peines que nous avons par vous souffertes.