Pétrarque

Ce torrent, qui bondit, et jette
Son écume de neige et d’or,
Etait l’emblème du poète,
Quand sa muse prenait l’essor.
A ces bords sa gloire s’allie ;
Son ombre, est le Dieu de ces eaux :
Mais, le chantre de l’Italie
N’éveillera plus ces échos!

Quand, sur cette onde diaphane,
Se reflètent les feux du soir,
Quand, dans les cieux la lune plane,
Barde divin, je crois te voir!
Je t’évoque, je te supplie…
Et tout reste dans le repos ;
Car, le chantre de l’Italie
N’éveillera plus ces échos!

De la lyre, qui chanta Laure,
Nul n’a recueilli les débris ;
Les Dieux, que cette lyre adore,
Parmi nous ont été proscrits :
On vous a traînés dans la lie,
Amour, liberté, noms si beaux!
Ah! le chantre de l’Italie
N’éveillera plus ces échos!

Sa voix énergique, et suave,
Se fit entendre tour-à-tour,
Défendant sa patrie esclave,
Ou chantant ses rêves d’amour.
Mais aujourd’hui, Rome avilie,
Revendique en vain des héros :
Non, le chantre de l’Italie
N’éveillera plus ces échos!

Plus de Rienzi, plus de Colonne.
Plus de grand homme inspirateur ;
De Capitole, où l’on couronne
Le poète triomphateur ;
Plus de femme qu’on déifie,
Ange, qui bénit nos travaux ;
Oh! le chantre de l’Italie
N’éveillera plus ces échos.

Adieu, rive qu’il a chantée,
Rocher, d’où jaillirent ses vers,
D’où sa poésie enchantée
A pris son vol dans l’univers :
Dans mes jours de mélancolie
Souvent j’errais sur ces coteaux,
Et le chantre de l’Italie
Éveillait pour moi leurs échos.


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Verset Pétrarque - Louise Colet